Centenaire d’une femme passionnée de justice : Sr Charlotte Leduc

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Entourée de quelques membres de sa famille et de quelques personnes qui ont croisé sa route, Sr Charlotte Leduc (en religion Paul-de-la-Trinité) a célébré son 100e anniversaire, le 27 février dernier à la Maison Jésus-Marie (MJM).

La journée a débuté avec la messe à la chapelle de la MJM aux intentions de Sr Charlotte. Célébrée par l’abbé Gilles Fontaine, cette messe a donné le ton avec le mot d’introduction de Sr Beverley Wattling rappelant le parcours de cette « éducatrice dynamique et enthousiaste… » dévouée au bien-être et à la réussite de tous ses élèves.

Cette « citoyenne du monde » a fait honneur à son nom religieux, a mentionné Sr Beverley « elle ressemblait à Paul : un disciple qui ne restait pas à la maison, mais qui allait partout où il y avait un besoin, un disciple prêt à se soumettre à toutes sortes d’épreuves et de difficultés pour bâtir le royaume de Dieu. »

Le groupe restreint d’invités, dont ses sœurs (Sr Carmen et madame Michelle Leduc), le fils de cette dernière, deux nièces, madame Charlotte Baillargeon et une intervenante de la Maison de Jonathan, madame France Houle au moment où Sr Charlotte y œuvrait comme bénévole auprès des jeunes décrocheurs, s’est rassemblé à la salle communautaire du rez-de-chaussée pour le dîner.

Un parcours aux horizons multiples

Puis la fête a continué en compagnie des résidentes de l’étage et d’autres religieuses invitées. Sr Carmen Leduc, sœur de la centenaire, lui a rendu hommage (voir quelques extraits ci-dessous).

Les sœurs Beverley et Hélène ont enchainé avec un bref récapitulatif du parcours « de la vie de foi, de courage et de sincérité, d’ouverture au monde et de détermination » de Sr Charlotte.

Ainsi, après avoir enseigné au Québec, entre 1944 et 1951, notamment à l’école des Saints-Anges, Sr Charlotte réalise son rêve de partir en mission. Elle se dirige vers le Basutoland, devenu par la suite, le Lesotho. Que de défis à relever, à commencer par la langue à maîtriser, le sesuto, les habitudes de vie totalement différentes, les pannes de courant constantes…! Comme elle l’a si bien décrit elle-même : « Ici, c’est la vie commune : poules, vaches, bœufs, canards, chiens, lézards, etc., nous vivons ensemble et nous nous aimons bien. »

Revenue au Québec après 10 ans au Lesotho, Sr Charlotte poursuit sa carrière en enseignant notamment l’anglais ou le français, langue seconde dans de nombreuses écoles pendant neuf ans. C’est au cours de cette période qu’elle fait la rencontre de l’abbé Fontaine, à l’école Curé-Lequin. Ce dernier, alors jeune vicaire, visitait les classes régulièrement. Sr Charlotte parlait souvent avec lui des difficultés rencontrées par certaines de ses élèves pour tenter de trouver des solutions.

Nouvelles destinations : Cameroun et Haïti

En 1970, en réponse à l’appel du cardinal Léger, Sr Charlotte part avec deux compagnes au Cameroun, dans le diocèse de Mgr Zoa, pour aider la sœur camerounaise, directrice de l’école. Alors que ses compagnes repartent au bout de deux ans, Sr Charlotte s’engage dans un autre diocèse pour enseigner l’anglais comme langue seconde aux garçons de 12 à 20 ans au Séminaire Saint Paul de Lyon à Douala. « Mes plus belles années sont celles où j’ai enseigné au Séminaire de Nylon au Cameroun », souligne-t-elle dans ses notes biographiques.

Au cours de son séjour de huit années au Cameroun, Sr Charlotte a agi comme directrice suppléante au Collège Chevreuil et même, comme gardienne d’un jeune prisonnier, prénommé Thomas!

Revenue au Québec, Sr Charlotte s’est occupée de la traduction des textes lors de la rédaction des nouvelles constitutions de la congrégation. Après un voyage en Terre sainte, un « cadeau de la vie », Sr Charlotte qui souhaite repartir pour le Cameroun, se voit plutôt inviter à répondre aux besoins importants en Haïti où sa sœur Carmen est déjà à pied d’œuvre. Charmée par le peuple qualifié d’accueillant et sympathique, Sr Charlotte dirige une école primaire à Gros Morne et fonde une école ménagère — le Centre Durocher —, pour les filles et les jeunes dames.

Femme engagée

Son travail missionnaire à l’extérieur prend fin en 1988, mais pas son action apostolique! Elle multiplie ses engagements en donnant des cours de francisation aux immigrant.e.s. Elle s’active en pastorale paroissiale, prend une formation pastorale pour répondre aux besoins des malades à St. Mary’s Hospital et ailleurs. Elle s’engage dans un ministère qui lui tient particulièrement à cœur, soit l’aide aux jeunes décrocheurs avec la Maison de Jonathan, et ce, entre 1991 et 2000.

Elle quitte Montréal en 2011 pour vivre à la Maison Jésus-Marie. Elle se tient au courant des nouvelles du monde, continue de soutenir des causes et des organismes et prie pour les pauvres. Après avoir célébré ses 25, 50, 60, 70 et 75 ans de vie religieuse, Sr Charlotte franchit le cap des 80 ans de profession religieuse au sein de la congrégation des Sœurs des Saints Noms de Jésus et de Marie (SNJM) en cette année 2024.

Une vie engagée bien remplie, mais « c’est toujours la même Charlotte : une femme passionnée de Dieu et de justice, une femme d’action pour les pauvres, les peuples opprimés et les femmes, une femme de courage et de sincérité », ont conclu les présentatrices.

La fête s’est poursuivie avec des échanges de souvenirs et de souhaits, la remise d’un cadeau au nom des sœurs de l’étage et une collation. Reportage photo : Sr Hélène Harvey

 

Témoignage de Sr Carmen Leduc à sa sœur Charlotte (extraits)

« La vie c’est comme un tricot…

Dieu nous donne la laine et les aiguilles…

Il nous dit : tricote de ton mieux une maille à la fois.

Une maille, c’est une journée sur l’aiguille du temps…

Sœur Charlotte, tu es rendue à combien de mailles?

Combien de journées : 365 x 100 = 36 500 journées…! »

« Sœur Charlotte est une citoyenne du monde. Elle s’intéresse aux grandes causes politiques et religieuses. La lutte à la pauvreté. La cause des femmes, la mondialisation et ses conséquences pour le Tiers-Monde, la situation des peuples opprimés, la quête de sens chez les jeunes, etc. »

« J’ai toujours voulu, dit-elle, être la louange pour l’Éternel. L’Eucharistie m’a permis des actions et des gestes privilégiés. »

« Ce qui la caractérise : aider les démunis, faire des marches, signer des pétitions… L’environnement la réjouissait : l’eau… les oiseaux… la planète. »

« Le courage, la persévérance, la patience, la sincérité, le respect de tous, la joie de vivre habitent constamment cette femme exceptionnelle.

Modèle de positivisme, c’est avant tout une femme possédant une foi absolue à travers le partage, la générosité et l’amour traduits au quotidien.

Bref, c’est en voyageant sur l’internet que Sr Charlotte élargit ses champs de connaissances et d’engagements. Sa soif de connaître, son dynamisme, son intérêt pour la croissance des personnes révèlent encore chez elle une éducatrice dont l’esprit et le cœur n’ont pas vieilli.

Aujourd’hui 100 ans!

Dieu seul sait quelle sera la longueur du foulard de sa vie! »