CSW65 : Deux participantes constatent la nécessité d’une sensibilisation accrue pour contrer la traite

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La pertinence de sensibiliser davantage les intervenants dans les milieux de soin et la population en général s’est imposée dans l’esprit de deux des étudiantes universitaires ayant participé au projet Université – CATHII à l’ONU. Lors de leur exposé respectif auprès des membres du CATHII*, Zaréma Bulgak, étudiante au baccalauréat en travail social à l’Université McGill et Annie Bernier, au doctorat en sciences humaines appliquées à l’Université de Montréal, ont fait ressortir leurs découvertes et leurs espoirs en regard de la problématique de la traite des personnes.

Se présentant comme une passionnée de la défense collective des droits des femmes, Zaréma a avoué sa méconnaissance du phénomène de la traite humaine avant d’intégrer le projet. « J’ai réalisé en assistant à la formation du CATHII et aux conférences CSW65** que la légalisation de la prostitution n’était pas suffisante pour arrêter la traite dans ce secteur. La présence de nombreux problèmes sociaux contribue également au phénomène de la traite, que l’on pense à la pauvreté, les conflits, l’industrie de la pornographie devenue de plus en plus violente qui nous désensibilise. » S’ajoutent également les discriminations et les pressions systémiques comme le racisme et le sexisme sans oublier la demande des clients.

Reconnaissant que l’on associe souvent la traite à la question de l’exploitation sexuelle, Zaréma s’est sentie interpellée par les autres formes de traite. Elle a été particulièrement touchée par l’une des conférences de la CSW65 qui a fait ressortir le caractère invisible de la traite dans des secteurs aussi diversifiés que les vêtements, la nourriture et le travail domestique. En somme, tous des aspects qui nous concernent dans notre quotidien.  

Au cours de son exposé, elle a déploré que les victimes souhaitant s’en sortir soient souvent perçues comme des « criminelles », des « immigrantes illégales » alors « qu’elles ont besoin simplement de protection et d’aide. »

Consciente qu’il y a un long travail à effectuer pour réduire à la source le problème de la traite des personnes, Zaréma a confié être très stimulée par cette expérience offerte par le CATHII. Elle a encore beaucoup à apprendre sur le phénomène et devra effectuer bien des recherches afin de l’aider à agir plus efficacement auprès des victimes dans le futur, tout en tenant compte des contraintes et protocoles en vigueur dans sa profession. Elle espère continuer à travailler avec des groupes tels que le CATHII. Pour aider davantage les victimes et réduire le problème, elle estime qu’il faudra une « sensibilisation accrue de la population pour rendre moins invisible la traite. »

Sensibilisation de tous les milieux

Une conclusion à laquelle souscrit Annie Bernier, qui travaille à une thèse de doctorat sur le sujet. Dans le cadre de ses recherches et échanges avec des survivantes et à l’occasion de la CSW65, Annie a fait plusieurs découvertes qui l’interrogent sur le niveau de sensibilisation à la traite des intervenants œuvrant dans tous les milieux (hospitalier, santé mentale, etc.)

« J’ai été particulièrement intéressée par les initiatives militantes du groupe de jeunes Live2free aux États-Unis qui a réussi, malgré les impacts de la pandémie les privant d’organiser des événements, à développer des campagnes de sensibilisation en ligne et finalement atteindre un plus grand auditoire que dans leurs activités régulières. »

S’étant inscrite au projet Université-CATHII à l’ONU dans le but d’élargir son réseau de contacts gravitant autour de la traite des personnes, Annie en a aussi profité pour découvrir le fonctionnement de l’ONU et pour s’ouvrir aux particularités du phénomène de la traite dans les autres pays.

La teneur des conférences, notamment celle impliquant des survivantes, a été marquante. Ces dernières non annoncées comme telles ont mis à profit leur expérience et créé un groupe pour mettre en place des organismes d’aide aux victimes de traite. « Elles ont partagé leur expérience personnelle et aussi les moyens pour venir en aide aux victimes. Je pense qu’il faudrait de plus en plus intégrer de survivantes dans les organismes d’aide. Nous voulons bien faire, mais il y a des choses qui nous échappent comme personne non survivante. Avoir une survivante dans les organismes permettrait d’avoir une connaissance plus fine de l’exploitation », a-t-elle souligné.

Annie constate qu’il n’existe pas beaucoup d’organismes dédiés spécifiquement aux survivantes et que ces dernières ne reçoivent pas toute l’écoute nécessaire lorsqu’elles doivent se rendre d’un service d’aide à l’autre. Un constat qui s’impose de plus en plus et qui met en lumière, la diversité des problèmes occasionnés par cette exploitation et l’impossibilité de profiter d’une approche d’aide globale.

La rencontre virtuelle s’est terminée par une période de questions et quelques commentaires des membres du Comité d’action et de lutte contre la traite humaine interne et internationale (CATHII). Plusieurs points positifs sont ressortis et venus confirmer la justesse du projet qui a atteint ses objectifs de départ, si l’on en juge l’intérêt manifeste des étudiantes au sujet de la traite, leur sensibilisation accrue et leur désir de garder contact avec l’organisme. Pour les membres, le projet Université-CATHII à l’ONU s’avère positif. Dans le prochain numéro du bulletin CATHII Info, on présentera le témoignage des autres participants au projet.

Rappelons en terminant que le projet Université-CATHII à l’ONU a permis à huit étudiants des trois niveaux universitaires (baccalauréat, maîtrise et doctorat) de quatre universités québécoises à participer aux sessions virtuelles de la 65e session de la Commission de la condition de la femme (CSW65) des Nations Unies, tenues au mois de mars dernier.

 

* Comité d’action et de lutte contre la traite humaine interne et internationale (CATHII)
**65e session de la Commission de la condition de la femme (CSW65)