S’ouvrir aux autres pour lutter contre les préjugés

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Récollection 1 – Religion juive

Venue parler de sa religion, la religion juive, Madame Sharon Helfer a partagé les connaissances acquises par sa propre quête de sens et ses expériences. Cette première rencontre, d’une série de conférences orientées vers le dialogue interreligieux avait lieu à la Résidence Marie-Rose Durocher, le 22 novembre dernier.

Pour étoffer sa présentation voulant expliquer ce que dit la foi juive sur Dieu et la façon de pratiquer cette religion selon les diverses confessions judaïques, Madame Helfer a élaboré sur les trois points suivants :

Qui est Dieu dans la foi juive? Qu’est-ce que la foi juive? Et comment connaître et servir Dieu?

Qui est Dieu dans la foi juive?

Le Dieu juif n’a pas d’apparence physique, il n’est pas corporel même si l’on parle dans la Torah de la main et du cœur de Dieu. C’est le Créateur de l’univers. Il est immanent à sa création. Il est une présence intime. Son aspect féminin se nomme « Shekinah ».

Cette érudite nous présente le Dieu juif comme un « Dieu de l’alliance. Un Dieu qui accompagne. Tout ce qu’il est, nous dépasse. » Son unicité est d’ailleurs proclamée par la prière qui commence par « Écoute Israël, Dieu est Un » (Dt 6,4-9).

Ce Dieu des alliances est fort bien représenté par la sortie d’Égypte qui constitue un moment central dans la foi juive. C’est à ce moment-là que Dieu mentionne « Désormais si vous gardez mon commandement, je serai votre Dieu et vous serrez mon peuple. »

Qu’est-ce que la foi juive?

La conférencière a présenté un tableau des religions mondiales pour brosser un portrait juste de la situation. On y découvre alors que les chrétiens occupent la première place avec 33,6 % des croyants, suivis des musulmans avec 20,28 %. La religion juive se situe à 0,23 %, soit après la population qui se déclare athée à 2,35 %. C’est ce qui a fait dire que « les Juifs sont une minorité fière. »

Le respect et l’amour de la Torah se traduisent par la profession de scribe et par le port de phylactères et la possession de mezouzah (étui longiligne qui contient deux textes de la Loi).  Ils se manifestent aussi par la fête de Sim ‘Hat Torah. Cette dernière est une fête de réjouissance où l’on célèbre la Torah en promenant le rouleau et en dansant le 9e jour de la fête de Souccot.

Avec le temps, la foi juive a bien évolué sous l’influence des femmes même si celles-ci ont encore de la difficulté à trouver leur place.

Au cours de ses explications, Sharon présente une roue qui représente les fêtes liturgiques de l’année, célébrant les dimensions : agricole, historique et familiale. Tout en décrivant chacune d’entre elles, la conférencière rappelle que la Pâque juive est la fête la plus célébrée.

Elle souligne également l’existence d’une division entre les Juifs. Il y a ceux de l’Est et de l’Europe ayant développé la langue yiddish (mélange de langues et de l’hébreu) et ceux de l’Espagne. On parle ici de la branche sépharade, sous l’influence arabe et dont la langue est le ladino.

Comment connaître Dieu?

À cette question importante, Sharon a une réponse simple et claire. « Si on aime Dieu, on veut le connaître, étudier sa création, d’où le respect et l’amour pour la Torah. »

Membre des Juifs réformés, Sharon a rencontré l’Imam de la mosquée de Québec. Elle a fait le constat qu’en apprenant à mieux se connaître mutuellement, on « améliore notre connaissance de Dieu. » Sa recherche passe ainsi par une meilleure connaissance et compréhension des humains.

Poursuivant ses explications sur les distinctions du judaïsme, Sharon aborde la Kabbale, une voie mystique du judaïsme, en soulignant l’existence de trois branches. Elle fait alors mention des trois livres clés que sont : le livre de la Création (3e ou 4e siècle), le livre de la Clarté (Languedoc – 12e siècle) et le livre de la Splendeur ou Zohar (Moïse de Léon, 13e siècle – Espagne).

Elle poursuit en mentionnant l’existence d’une autre clé que sont les dix sefiroth. Ces derniers sont les visages de Dieu représentés dans le corps tels que la sagesse et la beauté, par exemple. Elle parle également de la réparation du monde, une théorie de la kabbale (17e siècle) voulant que Dieu se soit contracté pour créer. La lumière divine présente dans des contenants, s’est alors brisée. Pour réparer, il faut suivre les commandements, en priant, en aidant son prochain et en mangeant casher.

Elle termine cette partie de sa présentation en signalant une autre distinction : l’union de l’homme et de la femme.  La présence de Dieu parmi nous est décrite par la notion de Shekinah, envisagée comme la part féminine de Dieu. Dès lors on peut comprendre les métaphores de la relation conjugale pour rendre compte du désir d’union entre le En sof (l’Infini) et la Shekinah.

Comment servir Dieu?

Parmi les autres éléments distinctifs, soulignons que l’idée de la justice sociale est très présente dans leur religion. Elle mentionne le fait que les Juifs servent Dieu en marchant en solidarité. Ils prient avec leurs pieds!

Ils utilisent leur libre arbitre en faisant le bien et en exerçant la miséricorde dans le monde. Le mal ne peut être camouflée, ils cherchent le chemin où marcher quand ils souffrent et ils essaient de transformer le mal en bien.

En abordant la présence de la miséricorde dans le judaïsme, Sharon cite un rabbin « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’on te fasse à toi-même. »

Un parcours atypique

Élevé dans un foyer moderne où l’on ne parlait pas beaucoup de Dieu, Sharon a fait la connaissance de la foi lors d’une rencontre avec un rabbin dans une synagogue au moment où il lui a parlé que « Dieu est bon. »

C’est en Israël qu’elle a rencontré son mari, Peter, natif de Suède. Mère de trois garçons, sa famille fait alors partie d’une communauté. Elle rédige une thèse de doctorat sur cette communauté. Puis, elle qui ne connaissant pas encore la prière, entreprend une deuxième maîtrise et un doctorat en études juives.

Découvrant toute l’importance de l’appartenance, elle ne se contente pas de poursuivre ses recherches sur les études juives. Elle s’intéresse plutôt au dialogue sans perdre de vue que les Juifs sont minoritaires.

Elle met l’emphase sur l’écoute, ce qu’elle appelle l’histoire orale. Elle participe au dialogue judéo-chrétien au Québec. Cette démarche opère une transformation intérieure qui lui permet de voir l’autre comme une sœur, un frère. « Il faut combattre le préjugé de penser que l’autre me veut du mal », affirme-t-elle.

Aujourd’hui, Sharon a entrepris un post-doctorat sur l’histoire orale des Juifs, des Cambodgiens, des Rwandais et des Haïtiens. Elle écoute les histoires de vie tout en recensant les données recueillies dans une base de données.

La conférence a été riche en contenu étoffé touchant plusieurs aspects, dont la question du pardon, des nombreuses branches de la religion juive et du conflit avec les Palestiniens.

La rencontre s’est terminée par une célébration à la chapelle. Rappelons que cette activité a été organisée par le comité d’animation spirituelle SNJM.

Source : Sr Constance Létourneau

Reportage photos : Sr Yolande Dufresne